Les chroniques d'Antiigone : Just Kids - Patti Smith

Bonjour tout le monde ! 👋

Aujourd'hui, il est temps que je vous parle du livre le plus abîmé de ma bibliothèque ! Hein ?! Sacrilège ! 😱 Oui, vous avez bien lu : un livre abîmé, amoché par ses nombreux voyages dans mes poches ou dans mon sac, aux pages gondolées par le sable humide ou l’herbe grasse des montagnes, jaunies par le temps et la lumière. Bref, un livre qui a voyagé et m’accompagne depuis mon adolescence. Je ne compte plus le nombre de fois où je l’ai lu.

Mais de quel bouquin s’agit-il ? De « 𝗝𝘂𝘀𝘁 𝗞𝗶𝗱𝘀 » l’autobiographie de 𝗣𝗮𝘁𝘁𝗶 𝗦𝗺𝗶𝘁𝗵, aux éditions Folio.

Dernièrement, j’ai lu les autres livres de la poétesse et « M. Train », qui en est, en quelque sorte, la suite, m’a donné envie de me replonger dans les débuts de sa vie d’artiste. C’est le genre de livre dont la perception se précise et s’approfondit à chaque lecture. En fonction de ma propre évolution, de ma propre connaissance, je le découvre à chaque fois sous de nouvelles facettes !

Alors…

« Branchez la guitare

Entonnez le tambour

Moi, j'accorde ma basse

Un, deux, trois, quatre » [1]… Place à Patti Smith !

QUELQUES MOTS SUR PATTI SMITH (cliquez sur les titres pour les (re)découvrir 😉)

Je l’ai connue grâce à son titre phare « Because the night », comme beaucoup d’entre nous, j’imagine. Ceux qui me connaissent auront sûrement à l’esprit cette fois où j’ai scandé ces paroles a capella pour la fête de la musique, dans une tenue où je tentais de ressembler à mon idole punk. Malheureusement, aucune vidéo de cet épisode mémorable n’a été capturée, mais j’en garde un très bon souvenir (peut-être que les gens, un peu moins…). Je me rappelle avoir dansé seule dans mon salon au son de ses vinyles empruntés en douce à ma mère. J’ai aussi pleuré toutes les larmes de mon corps sur « Easter », rêvé de « Frederick » et me suis déchaînée au son inspirant de « So You Want to Be (a Rock 'n' Roll Star) ».

Patti Smith

Patti Smith une artiste américaine engagée qui a commencé par écrire des poèmes et dessiner, puis est entrée dans le monde de la chanson. Ah oui, et elle n’est pas moins considérée comme la marraine du mouvement punk. Haut les cœurs, les filles !

Ce qui me plaît dans ses œuvres, c’est qu’elles m’apparaissent tellement complètes, sans pour autant être complexes, et qu’elle touche à plusieurs discipline, le tout en accord total avec sa personnalité. Ce que j’apprécie est donc son intégrité. Issue d’un milieu populaire et ayant dû faire face à plusieurs événements de vie, elle est toujours restée fidèle à elle-même et parvient à voir de l’Art, de la poésie en toute chose, tout en restant simple et humble. Loin de strass et paillettes, j’aimerais tant vieillir comme elle !

ROBERT MAPPLETHROPE

Si le livre commence à la naissance de l’artiste, on passe bien vite sur ses jeunes années pour la retrouver lors de son voyage à New York en 1967. Elle cherche à s’établir en tant qu’artiste et trime pendant quelque temps pour survivre. Dans son périple, elle fera la connaissance de Robert Mapplethrope, artiste également.

Robert Mapplthrope

Connu tout d’abord pour ses colliers, il se tourne peu à peu vers le dessin et, surtout, la photographie. Ses inspirations sont diverses et font scandale à l’époque : de la religion au BDSM, en passant par les sciences occultes, il aime déranger, il aime provoquer et se chercher à travers ses œuvres. Car, oui, nous assistons à l’éclosion d’une personnalité de plus en plus tourmentée, de plus en plus sombre, mais avec quelques éclairs de lumière de temps à autre.

Entre mesure et démesure, on assiste à l’évolution de cet artiste entier et tourmenté comme on n’en fait plus de nos jours. J’ai beaucoup apprécié le découvrir et imaginer ses œuvres à travers le regard de celle qui l’aime. Les chapitres sont agrémentés des photos, tableaux et autres clichés dont il est question dans le récit, le rendant encore plus vivant.

UNE HISTOIRE DE MUSES...

Patti Smith et Robert Mapplethrope

Ce livre raconte l’histoire de cette relation du point de vue de Patti. Son analyse est pointue et très juste. À travers ses mots, on ressent ses émotions et on participe à différents moments de doute et processus de création. La carrière de Robert est vue à travers de celle qui sera sa muse. Je n’ai eu aucune peine à m’imaginer tous leurs moments, l’auteure décrivant avec détails et précision chaque environnement, chaque mouvement important de cette relation… amoureuse, amicale ? Pour moi, c’est quelque chose de bien plus fort. C’est la perception d’un individu par un autre individu, c’est l’évolution des sentiments, c’est la découverte de soi à travers l’autre.

C’est beau, c’est touchant, c’est déchirant, sans tomber dans la romance mièvre, loin de là !

UN PEU DE PUNK, S’IL VOUS PLAÎT !

En parallèle de sa relation avec le photographe, on suit le parcours de Patti et sa découverte de sa vocation : la musique punk. Enfin, à l’époque, cela ne s’appelle pas encore comme ça, mais on y viendra ! Patti cherche à s’exprimer, même si le chant ne s’impose pas directement à elle. C’est à travers différentes rencontres significatives qu’elle sera amenée à prendre le micro et à scander ses poèmes telle qu’on la connaît aujourd'hui. Ses inspirations, issues de tous les domaines, nous sont également présentées et donnent à voir un versant méconnu de la personnalité de Patti.

On y fait la connaissance de plusieurs figures éminentes de l’époque, notamment avec Sam Shepard ou Janis Joplin. Le récit est jalonné d’anecdotes glanées lors de son séjour à l’emblématique Chelsea Hotel. Toute cette époque, cette ambiance new-yorkaise, entre luxe, création et débauche, est très bien retranscrite. Autant dire que j’étais comme un poisson dans l’eau entre ses pages !

Cette autobiographie est le témoin d’une époque révolue et une ode à l’Art avec un grand A. Je me suis particulièrement retrouvée dans un passage que je ne peux résister de vous partager. Il parlera sans doute de lui-même et mes lecteurs reconnaîtront sûrement les valeurs de l’une de mes héroïnes [2] :

« Certains d’entre nous sont nés rebelles. En lisant la biographie de Zelda Fitzgerald par Nancy Mitford, je me suis identifiée à son esprit indocile. Je me souviens qu’un jour, passant devant une vitrine avec ma mère, je lui ai demandé pourquoi les gens ne les cassaient pas tout simplement. Elle m’a expliqué qu’il existait des règles tacites du comportement en société, et que c’est ce qui nous permettait de coexister en paix. L’idée que nous naissions dans un monde où tout a été organisé par ceux qui nous précèdent m’a immédiatement parue oppressante. Je me suis escrimée à repousser mes pulsions destructrices et à travailler au contraire sur mes pulsions créatrices. Cependant, la petite insoumise qui sommeillait en moi ne s’était pas éteinte. » Lorsque j’ai parlé à Robert de mon désir enfantin d’exploser les vitrines, il s’est gentiment moqué de moi. « Patti ! Non. T’es vraiment une mauvaise graine », a-t-il dit. Mais il avait tort. » ("Just Kids", Patti Smith, 2010, p. 243).

Oui, il avait tort ! Mais pour notre plus grand bonheur.🤘

POUR CONCLURE

Tout, absolument tout dans ce livre me plaît. C’est un ensemble à prendre tel qu’il est et, quand on ouvre sa première page, on est directement et pleinement happés par les mots de Patti Smith. Elle nous ouvre les portes de ses inspirations, de sa vie et de son histoire avec Robert Mapplethrope, photographe et artiste également. L’Art est placé au centre du récit. Cette autobiographie est vivante, elle nous en apprend davantage sur celle qu’est la marraine du mouvement punk, sur ses inspirations, sa vie, les lieux qu’elle visite, ses valeurs, ses épreuves et ses doutes.

Alors, que vous connaissiez ou non Patti Smith, que vous l’appréciez ou non, je vous invite à mieux la connaître à travers son autobiographie.

[1] Le Brio (Branchez la guitare), Big Soul (1995).

[2] Il s'agit bien sûr d'Alice Ferland, l'héroïne des "Dangers de la lumière" ! 😉 Tu fais partie de l'élite si t'as trouvé !